Quand Le Roussillon du sculpteur Belloc devait marquer l’entrée de Perpignan.

Lors de l’aménagement de la ville au début du XXe siècle, de nouvelles places voient le jour. La place de la Catalogne est gagnée sur les remparts arasés. En 1911, elle fait face à l’immense magasin moderne « Les Dames de France », construit de 1905 à 1907 par l’architecte Georges Debrie et l’entrepreneur M. Pourxet pour le compte de la société Paris-France. Coté ouest, cette place est au débouché de l’avenue de la Gare, créée à la même époque. Et coté nord, elle est la première à l’entrée du pont Arago depuis la route de Narbonne.

Les Dames de France, Fonds BNC, Barcelone.

Devant les Dames de France, Fonds BNC, Barcelone.

L’idée germe d’un emplacement propice à la commande publique pour un monument. Un groupe statuaire est alors proposé par l’artiste Belloc, le 29 septembre 1911 dans une correspondance auprès du maire de l’époque Nérel.

Jean-Baptiste Belloc est né le 30 avril 1863 à Pamiers ou il effectue des études de dessins puis obtient une bourse de la commune et du département pour l’École des beaux-arts de Paris dès 1882 dans les ateliers de Jules Dumont, Jean-Marie Bonnassieux et Gabriel-Jules Thomas. Il expose au Salon des artistes français à partir de 1888 et obtient, en 1890, le premier second grand prix de Rome pour son œuvre « L’Âge d’or » en tant qu’élève d’Antonin Mercié. Avec plusieurs séjours en Afrique du Nord à partir de 1897, il devient sculpteur attitré du Ministère des Colonies en réalisant de nombreuses sculptures en Tunisie et en Algérie. Ses statuettes de petit format seront éditées en bronze par Ferdinand Barbedienne.

Mort à Paris en 1919, il est enterré au cimetière de Perpignan ou des hommages publics seront organisés par la ville et la Société des amis du musée. Celui-ci possède plusieurs œuvres données par sa veuve.

Voici la correspondance que Belloc adressa au maire de Perpignan : « En remerciement du très aimable accueil que vous avez bien voulu m’accorder, j’ai l’honneur de vous confirmer mon désir d’offrir à la ville de Perpignan un groupe sculptural qui a pour titre « le Roussillon » et cela pour les frais matériels nécessités pour l’exécution de cette œuvre.

Le Roussillon, par J.BELLOC

Le Roussillon, par J.BELLOC

Ce groupe, ci-joint une photographie de la maquette, se compose de trois personnages, un vieux berger, symbolisant la montagne, une belle vendangeuse pour la plaine, un jeune marin symbolisant la mer. Ce dernier personnage chante l’une de nos belles mélopées catalanes que le berger et le jeune fille écoutent avec ravissement.

Ce groupe qui serait décoratif, par son ensemble mais d’un caractère intime, quand au sujet, gagnerait à être réalisé en marbre, mais l’emploi de cette matière occasionnerait des déboursés que la municipalité jugerait peut être trop élevés.

Je vous propose donc monsieur le Maire, d’exécuter ce groupe en pierre pour les frais matériels qui s’élèveraient à 18 000 francs, me réservant de solliciter de l’État une subvention supplémentaire de sept mille francs, auquel cas le groupe serait fait en marbre.

La municipalité de Perpignan toujours heureuse des embellissements de notre chère cité et prête à encourager les Beaux-Arts, notamment dans les œuvres qui chantent la gloire et la beauté notamment de notre chère petite Patrie, accueillera j’espère, l’offre que j’ai l’honneur de lui faire.

Me souvenant sans cesse que je dois à l’appui moral et à la générosité de mes chers compatriotes, la situation artistique que j’occupe, ce sera avec la plus profonde émotion et la reconnaissance la plus vive que je chanterai le Roussillon, par une œuvre que je considère comme devant être ma meilleure.

Enfin monsieur le Maire, je crois bien faire en vous signalant que j’ai composé ce groupe avec l’espoir que la Municipalité voudra bien la placer sur le terre plein qui se trouve devant le magasin des Dames de France. La seulement ce groupe produira le plein effet décoratif et symbolique que je lui ai donné, car à l’entrée de la capitale du Roussillon, il dira aux étrangers qui toujours plus nombreux, viendront visiter notre pays, tout ce qui les attend ici de beautés naturelles incomparables, et de noble hospitalité. »

La proposition fut ajournée et renvoyé à la réunion de la commission des finances et celle des Beaux-Arts réunis. Le groupe ne fut jamais réalisé en pierre.

Sources: Archives Municipales de Perpignan, 1D/3, délibérations 2ième semestre 1911.

Ce contenu a été publié dans la coiffe catalane, Régionalisme-Folklore. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *