Les régionalistes et la question de la régénération du costume

 

 En 1928, les questionnements sur la disparition des costumes traditionnels incitent les principaux penseurs régionalistes à chercher le moyen d’inverser la tendance. L’idée est clairement édictée par J.Charles-Brun dans un article publié dans la revue du Touring Club de France éditée en 1928.

 

jeune femme posant en costume folklorique dans les années 1930

jeune femme posant en costume folklorique dans les années 1930

Sur le costume et les coiffes régionales, « on essaye des les remettre en honneur. Ce n’est guerre que d’une façon artificielle, une ou deux fois par an, pour réjouir l’œil du touriste, ou pour donner du caractère à une fête, et ce ne sont là que reconstitutions agréables et sans portée. Si l’on veut sauver le costume, il faut d’abord étudier les causes de sa disparition progressive. Les progrès des moyens de communication, l’imitation de la mode parisienne, l’exemple des hautes classes qui l’ont abandonné, y sont, sans doute, pour beaucoup. Mais deux autres raisons agissent. D’une part on s’obstine à maintenir le costume ancien et traditionnel, à imposer aux jeunes filles les atours de leurs grands-mères. Or là où il existe encore, il évolue.

Ce qui n’évolue pas est condamné à la mort, et la mode par essence est changeante. D’autre part, reconnaissons que le costume régional, tel qu’on nous le montre, est peu adapté à la vie moderne : il est souvent lourd, mal propre aux mouvements dégagés, il est presque toujours coûteux de confection et d’entretien, fait d’accessoires et de tissus difficiles à se procurer.

Jeunes Catalanes en 1925 lors d'une fête régionaliste à Perpignan.

Jeunes Catalanes en 1925 lors d’une fête régionaliste à Perpignan.

N’y a-t-il donc rien à faire ? Acceptons la loi de l’évolution. Gardons du passé ce qui est vivant. On peut, croyons nous concevoir un costume qui soit à la fois régional et moderne. Demandons aux artistes et aux créateurs de la mode de respecter la grande loi de variété, d’emprunter au style de la région tout ce qui peut être heureusement conservé, une forme harmonieuse, un assemblage de nuances appropriées au climat, mille détails particuliers ou se traduit le goût de la race. Que ces costumes se plient aux exigences de la vie présente, soient fait de tissus courants en vente dans tous les grands magasins, qu’ils flattent l’acheteuse par l’originalité. Leur succès nous paraît dès lors assuré. L’on ne doit pas oublier que le régionalisme n’est pas l’archéologie. Sa doctrine a pour base la tradition, mais une tradition sélectionnée, interprétée, adaptée et pour ainsi dire, vivante. »

A la fin du fascicule, le comité de rédaction insère la note suivante : « Pour la modernisation du costume régionaliste-projet d’exposition-Le comité adopte le principe d’une exposition de dessins, aquarelles, etc…sur la modernisation du costume régionaliste. Il envisage la collaboration des grands magasins, les projets présentés devant, dans notre esprit, tenir compte des conditions de l’existence moderne et être réalisables avec les tissus que l’on troue actuellement dans le commerce. Le comité considère que, s’il est matériellement impossible de perpétuer des costumes devenus trop coûteux, et ne se prêtant plus à la vie d’aujourd’hui, le régionalisme du costume  peut néanmoins évoluer, surtout s’il apporte aux femmes, jeunes filles et fillettes, des vêtements plus pratiques et mieux adaptés aux climats de nos provinces que ceux venus de Paris. Les artistes locaux sauront dégager des anciens costumes tout ce qui en fait le charme afin que cette évolution soit favorablement accueillie par la clientèle intéressée. Elle réveillerait enfin l’activité des ateliers provinciaux et par cela même deviendrait une source de bénéfices pour de nombreux ouvriers et ouvrières. »

Fête régionaliste à Perpignan vers 1925 devant l'usine Diogène.

Fête régionaliste à Perpignan vers 1925 devant l’usine Diogène.

Extraits de la Revue du Touring Club de France. 1928. A cette date J.Charles-Brun est alors président de la Fédération Régionaliste de France, et membre du Comité d’Art Régional du TCF. 

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