Attendu depuis un an, le décret, qui permettrait de protéger près de 240 produits, est annoncé pour mi-mars. Certains dossiers se révèlent complexes à monter
De Marseille à Limoges, en passant par Calais ou Aurillac, les fabricants de produits manufacturés « made in local » sont dans les starting-blocks. Cela fait quasiment un an que la loi Hamon, votée le 17 mars 2014, a étendu le label IG (Indication géographique) aux produits manufacturés. Selon la dernière liste officielle, 238 produits pourraient être concernés par le label. Mais tous attendent la parution du décret, passé par le Conseil d’Etat, qui détaillera le dispositif (le décret sur la protection des noms des collectivités locales paraîtra en même temps).
Le ministère, qui a fait un dernier tour de table des acteurs en janvier, évoque maintenant le décret pour la fin mars. Selon Carole Delga, secrétaire d’Etat à l’artisanat et à la consommation : «la reconnaissance de ces savoir-faire leur donnera une dynamique et un développement plus grand et une communication plus forte ». L’impatience est palpable. Car le label doit protéger des petites entreprises au savoir-faire reconnu mais menacées par une concurrence acharnée. « L’IG leur permettra de mieux se vendre mais surtout de ne pas disparaître » résume-t-on à Bercy.
Le dispositif a d’ailleurs été pensé pour être le plus simple possible. Dès parution du décret, le cahier des charges, établi par les groupements des entreprises concernées, pourra être homologué par l’INPI (Institut national de la protection industrielle) dans un délai « de 4 à 6 mois », voire un an maximum. Là où certains produits alimentaires attendent entre 5 à 10 ans pour obtenir le précieux sésame ! Ce « titre de protection de l’Etat » comme le rappelle l’INPI est obtenu pour une durée illimitée. « En comparaison, dans l’alimentaire, les critères sont revus chaque année en fonction de la production » explique Etienne Leroy, responsable IG à l’INPI. Le dispositif sera fondé sur l’auto-régulation. En cas de dysfonctionnement repéré par un organisme de contrôle agréé, ce sont les professionnels -regroupés en organisme de défense et de gestion (ODG)- qui doivent contraindre l’entreprise suspectée à se mettre en conformité. « Sinon, on retire l’IG à tout le monde » précise Etienne Leroy.
Sur le papier, l’affaire parait donc simple. Mais dans les territoires, les démarchent s’avèrent plus complexes. Certes, sept dossiers, déjà prêts, attendent le feu vert du décret : linge des Vosges, granit de Bretagne, parapluies d’Aurillac, grenat de Perpignan, dentelles de Calais, pierre de Bourgogne, Linge Basque. Mais les cas épineux qu’essaient de débrouiller les conseillers de Bercy existent : couteau de Laguiole, savon de Marseille, porcelaine de Limoges. Depuis plusieurs mois, ces professionnels échouent à se mettre d’accord. « Cet IG combine deux difficultés : un procédé technique difficile à définir et l’appréciation du lien avec le territoire, qui n’est pas aussi évident que dans l’alimentaire » justifie Etienne Leroy. Le ministère veille aussi à ce que le cahier des charges ne dérape pas vers un protectionnisme abusif histoire d’éviter que les artisans et les TPE utilisent l’IG pour créer des divisions ou de la concurrence entre eux. Vu la complexité de la démarche, les candidats pourraient finalement y réfléchir à deux fois. « On estime que 20% se lanceront dans un délai de deux à trois ans » indique-t-on à Bercy. Et pour sortir de l’impasse, certaines appellations risquent d’aboutir à d’iconoclastes indications : « couteau de Laguiole Aubrac/Auvergne » – pour englober le gros bassin de production de Thiers – ou « savon de Marseille IG » qui permettrait à la cité phocéenne de se distinguer des industriels tout en leur laissant le droit d’utiliser « savon de Marseille ». Pas sûr que le consommateur s’y retrouve dans ce cas.
paru dans : http://www.lesechos.fr/pme-regions/actualite-pme/0204189262215-indication-geographique-des-produits-manufactures-les-fabricants-simpatientent-les-homologations-prendront-moins-dun-an-il-faut-aller-vite-1097424.php