Dans la connaissance des costumes roussillonnais et cerdans des périodes de l’ancien régime, une aide précieuse provient des ex votos conservés dans certaines églises et ermitages. Ces panneaux de bois peints ont certainement été bien plus nombreux que les rares exemplaires que nous possédons in-situ. La redécouverte de pièces entrées dans des
collections privées permettraient de remédier à ces pertes.
Cet ex-voto est conservé à l’ermitage de Font-Romeu. Il donne une image assez précise de la tenue de l’épouse du chirurgien d’Odeillo. Celui-ci est représenté dans son lit avec un moine à son chevet.
Nous avons là une mise caractéristique de l’époque comprise entre la seconde moitié du XVIIe et les premières années du XVIIIe s.
Nous voyons une femme agenouillée en prière. Elle possède un jupon de couleur rouge vif. Sur ce jupon, nous avons probablement un manteau de robe en tissu plus sobre, porté sur une chemise dont on aperçoit le poignet. Le visage semble enserré dans une guimpe sur laquelle on reconnaît une capuche (caputxa).
Cette tenue que nous connaissons par d’autres ex votos conservés à Font-Romeu, Olette et Domanova (Conflent) possède l’avantage d’être datée. Nous apprenons en effet par le cartouche que cette peinture fut réalisée en 1702. L’homme alité est un élève chirurgien (jove xirurgià) d’Odeillo victime de saignements, la femme probablement son épouse. Nous mettons en relation quatre autres tenues locales, les deux premières de Domanova, la troisième d’un retable de Olette, la quatrième d’un autre ex voto de Font-Romeu. Même représentées de manière schématique, on peut envisager que chacune d’elles porte une jupe visible dans l’ouverture sur le devant par le manteau de robe, dont les pans sont repliés sur l’arrière. Ce n’est donc pas un costume véritablement local, mais plutôt l’interprétation des robes à la mode dans la seconde moitié du XVIIe s. dans la noblesse, dans une mise très simplifiée avec des textiles locaux, probablement à base de lainages.
La mode française de la seconde moitié du XVIIe s., fortement promue par la cour française, prend vite le dessus dans notre région sur la mode espagnole. La noblesse roussillonnaise comme celle du Languedoc voisin (voir l’ex-voto de Limoux) permet cet apport qui rejaillit sur l’ensemble de la population par la copie et le réemploi.