Le carnaval a été cette année favorisé par température exceptionnelle, aussi les fêtes ont été brillantes et les bals très fréquentés.
Les Loges de la parfaite Union et de Saint Jean des Arts ont ouvert et clôturé la série de réunions dansantes. Comme toujours, MM. les membres de ces Loges ont été de la plus exquise urbanité envers les nombreux invités qu’attire chez eux un accueil des plus sympathiques.
Le bal du jeudi gras est venu fournir à nos excentriques le prétexte des déguisements les plus bizarres, on suivait avec plaisir leurs évolutions, autour d’un essaim de jolis masques, dont les yeux scintillaient sous le velours noir des loups.
La soirée a été splendide et si les pierrots et les dominos ont été d’un mutisme désespérant, les danseurs ont prouvés qu’ils avaient des muscles d’acier. Est-ce bien une compensation ?
Il fut un temps pas si éloigné, où dans le couloir des galeries, trop étroit pour contenir la foule, s’engageait un feu roulant de lazzis et d’intrigues. D’indiscrets dominos y faisaient au profit de tous, la petite chronique, souvent scandaleuse, de l’année ; les rires couvraient les voix.
Aujourd’hui le silence règne le plus souvent dans ce corridor témoin jadis de si bruyants ébats, c’est à peine si l’on voit de temps en temps un masque s’y égarer au bras de son cavalier.
Ils viennent pour s’isoler…écoutez en passant leur conversation, vous surprendrez entre deux soupirs, cette phrase sentimentale : “Quand donc, mon ami, allons nous déjeuner ?”
Aussi à partir de minuit, le bal n’est il plus que dans la salle, exactement comme Mailloles n’est plus aujourd’hui que dans la ville.
Le journal des P.O., 1869.