Le syndicat patronal des bijoutiers horlogers des Pyrénées-Orientales aux XIX et XXe s.

argenterie proprios

Précoce et durable depuis le siècle des Lumières, la première des formes de sociabilités est, à Perpignan, celle de la franc-maçonnerie. C’est donc dans ce cadre, réactivé sous le Second empire, que se réunissent en premier lieu certains artisans bijoutiers. Ainsi, Edmond Mourat, orfèvre-bijoutier, Alexis Lacoste, ancien bijoutier, et Edmond Gibert, orfèvre, appartiennent à la loge « l’Union » entre 1853 et 1855. En 1858, le bijoutier Joseph Parès figure parmi les cinquante-huit membres affiliés au Grand Orient de France, dont le local est situé rues de l’Aloès et des Quinze degrés.

Une génération plus tard, les grands bijoutiers participent à l’animation des cercles de la ville. Le cercle de l’Union, situé dans l’immeuble historique dit de la Casa Xanxo, abritant également la loge du même nom, a pour vice-président Joseph Charpentier (né en 1854). En 1912, une splendide coupe en métal argenté lui est remise par ce cercle, à l’occasion de sa réception au titre de chevalier de la légion d’honneur. J. Charpentier assume alors des responsabilités au bureau de l’hôpital civil de Perpignan, qui se prolongent durant plusieurs années. De la même manière, au tournant du siècle, les bijoutiers se retrouvent au sein d’associations de commerçants telles le cercle du Commerce, situé rue des Fabriques (actuelle Maison Quinta).coupe

Profitant de la loi du 21 mars 1884 légalisant les syndicats, les professionnels de la bijouterie et de l’horlogerie créent dans l’intervalle leur propre syndicat patronal. Fondé le 1er septembre 1894, le Syndicat de l’association professionnelle des horlogers, bijoutiers et orfèvres de Perpignan et du département des Pyrénées-Orientales constitue une défense professionnelle importante. Comprenant trente et un membres, il est ouvert aux horlogers, bijoutiers et orfèvres en magasin ainsi qu’aux patrons indépendants sans employés et sans boutique, dont il est alors dit qu’ils travaillent en appartement ou « en chambre ». Ces patrons exercent à leur compte pour d’autres artisans. Les réunions du syndicat ont lieu en mairie de Perpignan.

La composition du conseil d’administration est la suivante : le premier président en est Antoine Rolland, établi rue des Trois journées. Les vice présidents  sont Charasse et Joseph Charpentier ; le secrétaire en est Eugène Nogué, le trésorier : Jacques Delmas, l’archiviste : Velzy. On remarque que le bureau comprend deux vice présidents : un horloger et un bijoutier, pour que chacune des deux professions soit représentée. L’échelle des situations professionnelles est également prise en compte puisque, parmi les six membres du bureau, figurent deux horlogers et deux bijoutiers tenant boutique, un horloger et un bijoutier sans boutique.P1330946

Les buts de la chambre syndicale mettent d’abord l’accent sur sa valeur unificatrice, exprimée en termes de confraternité, de concorde, d’équité et de conciliation: « Créer des relations et resserrer les liens de confraternité qui doivent exister dans nos industries, réaliser en vue du progrès moral et matériel toutes les améliorations qu’elle sera susceptible d’obtenir par l’étude, la concorde et l’équité… trancher par la conciliation les différends qui pourraient surgir parmi les membres de l’association et s’occuper de toute question d’arbitrage par une commission nommée à cet effet (art.2) ».

Dans le détail, le syndicat se dote de plusieurs objectifs et moyens. Les uns portent effectivement sur le règlement interne des différends et la promotion de la profession : arbitrage et conciliation gratuits, création d’une caisse de propagande et de défense des intérêts, recommandation de professionnels pour les achats de fournitures. Les autres ont une vocation plus sociale : œuvre philanthropique en faveur des ouvriers présentant l’examen d’ouvrier d’art, diminution de la durée du service militaire, recommandation des ouvriers horlogers et bijoutiers quittant le département.

A la première présidence d’Antoine Rolland succède celle de Joseph Charpentier. Après une période transitoire de 1919 à 1922 où la charge revient à J. Belmas, c’est à nouveau aux Charpentier qu’est dévolue cette responsabilité. Fils du précédent, Joseph Charpentier assume en effet la présidence du syndicat pendant une trentaine d’années.

Provisoirement, la seconde Guerre mondiale ne diminue pas le nombre des professionnels recensés. Le syndicat des horlogers, bijoutiers, graveurs, électriciens des Pyrénées-Orientales, situé rue Foch, coexistait avant guerre avec le syndicat perpignanais des marchands en bijouterie, objets d’art, quincailliers, faïence, situé place Rigaud. Ils sont toutefois tous deux dissous sous le régime de Vichy et le 13 mars 1942, afin de reconstituer les anciennes corporations, une entité professionnelle élargie est formée. Unissant, entre autres, horlogerie, bijouterie, droguerie, papeterie, photographie et charronnerie, son président est Jules Desperret. Pendant cette période, quelques bijoutiers ayant pignon sur rue figurent également comme actionnaires du journal local l’Indépendant du Midi, alors seul autorisé.

Au terme de la guerre, le syndicat des maîtres artisans bijoutiers et joailliers des Pyrénées-Orientales est reconstitué le 24 janvier 1949. Il compte alors vingt-deux membres ; la présidence est nouvellement assurée par Auguste Colomer, la vice-présidence par Benjamin Patto, François Marcé et Louis Montgon, la trésorerie par Louis Thomas. Les statuts sont redéfinis sous une forme dynamique et essentiellement économique : « Le syndicat se propose d’établir entre ses membres des rapports de bonne confraternité, d’aider au développement, à la prospérité des syndiqués et de soutenir leurs intérêts auprès des pouvoirs publics ». Il existe jusqu’à nos jours, et son siège est fixé à la chambre des métiers de Perpignan.

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *